La Commission européenne a constaté que la mise en œuvre du régime d’aide de la zone franche de Madère (régime III) au Portugal n’est pas conforme aux décisions de la Commission relatives aux aides d’État de 2007 et 2013. L’objectif de la mesure approuvée était de contribuer au développement économique de la région ultrapériphérique de Madère au moyen d’incitations fiscales. C’est pourquoi les décisions de la Commission ont subordonné l’octroi des réductions fiscales à la condition que seules les entreprises qui créent des emplois à Madère en bénéficient et que les réductions fiscales soient appliquées aux activités effectivement et matériellement exercées à Madère.
Toutefois, l’enquête de la Commission a montré que les réductions fiscales ont été appliquées à des entreprises qui n’ont pas réellement contribué au développement de la région, y compris à des emplois créés en dehors de Madère (et même de l’UE), en violation des conditions des décisions et des règles communautaires en matière d’aides d’État.
Le Portugal devra donc maintenant récupérer les aides auprès des entreprises concernées qui n’ont pas créé d’activité économique et d’emplois réels à Madère”.
Le 6 juillet 2018, la Commission a ouvert une enquête approfondie afin d’examiner si le régime portugais en faveur des entreprises établies dans la zone franche de Madère avait été mis en œuvre conformément aux dispositions des années 2007 et 2013.
Au cours de l’enquête approfondie, la Commission a constaté que :
- Le nombre d’emplois pris en compte par le Portugal pour le calcul du montant de l’aide dans le cadre du régime comprenait des emplois créés en dehors de la zone franche de Madère et même en dehors de l’UE. En outre, les emplois à temps partiel ont été pris en compte comme des emplois à temps plein et les membres des conseils d’administration ont été comptés comme des salariés de plusieurs entreprises bénéficiant du régime, sans méthode de calcul adéquate et objective.
- Les bénéfices bénéficiant de la réduction d’impôt n’étaient pas limités à ceux liés aux activités effectivement et matériellement exercées à Madère.
Sur cette base, la Commission a conclu que le régime, tel que mis en œuvre, n’était pas conforme aux décisions de la Commission de 2007 et 2013 et que ces aides individuelles accordées aux bénéficiaires étaient illégales et ne pouvaient être considérées comme compatibles avec le marché intérieur sur la base de l’article 107, paragraphe 3, point a), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).
Récupération des aides incompatibles
En principe, les règles de l’UE en matière d’aides d’État exigent que les aides d’État incompatibles soient récupérées sans délai afin de supprimer la distorsion de concurrence créée par l’aide. Les règles de l’UE en matière d’aides d’État ne prévoient pas d’amendes et la récupération ne pénalise pas les entreprises en question. Elle rétablit simplement l’égalité de traitement avec les autres entreprises.
Il appartient maintenant au Portugal de déterminer le montant à recouvrer auprès de chaque bénéficiaire individuel, conformément à la méthodologie définie dans la décision de la Commission adoptée aujourd’hui. Le Portugal doit identifier parmi les bénéficiaires ceux qui n’ont pas respecté les conditions des décisions de la Commission relatives aux aides d’État de 2007 et 2013 approuvant le régime III (c’est-à-dire la création d’emplois dans la région et le lien des revenus avec une activité effectivement et matériellement exercée à Madère). Par conséquent, les chiffres définitifs concernant le nombre d’entreprises soumises à récupération et le montant total de l’aide à récupérer ne peuvent être connus à ce stade.
Contexte
Les régions ultrapériphériques comprennent Madère, les Açores, les îles Canaries, la Guadeloupe, la Guyane française, la Martinique, la Réunion, Saint-Barthélemy et Saint-Martin. Pour tenir compte de leurs handicaps spécifiques (éloignement, insularité, faible superficie, topographie et climat difficiles, dépendance économique vis-à-vis d’un petit nombre de produits), l’article 349 du TFUE autorise un traitement exceptionnel de ces régions, notamment en vertu des règles de l’UE relatives aux aides d’État. En reconnaissance de la gravité des désavantages structurels auxquels sont confrontées les entreprises situées dans ces régions, la Commission a établi des règles spécifiques en matière d’aides d’État, dans le cadre des lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale et, à partir de 2014, dans le règlement général d’exemption par catégorie. En particulier, ces régions bénéficient toutes automatiquement du statut de région assistée prioritaire (régions relevant de l’article 107, paragraphe 3, point a), du TFUE). En raison de ce statut, toutes les entreprises ayant une activité économique dans ces régions peuvent bénéficier de primes supplémentaires allant jusqu’à 20 % en plus des plafonds normaux d’aides régionales à l’investissement. En outre, les États membres peuvent accorder des aides au fonctionnement aux entreprises situées dans ces régions afin de compenser les coûts supplémentaires auxquels elles sont confrontées dans ces régions éloignées.
Depuis 1987, la Commission a approuvé à plusieurs reprises les versions successives d’un régime de réduction de l’impôt sur les sociétés notifié par le Portugal pour les entreprises établies dans la zone franche de Madère.
Le régime de la zone franche de Madère est un régime d’aides régionales prévoyant des aides au fonctionnement sous forme de réduction de l’impôt sur les sociétés pour les bénéfices résultant d’activités exercées à Madère. D’autres réductions d’impôt sont prévues, telles que l’exonération des taxes municipales et locales, ainsi que l’exonération de l’impôt sur les mutations foncières pour l’établissement d’une entreprise dans la zone franche de Madère. Le régime d’aides régionales du régime III a été mis en place par le Portugal afin d’attirer les investissements et de créer des emplois à Madère.
Chaque année, la Commission sélectionne un certain nombre de mesures d’aides d’État afin de vérifier si les États membres les mettent en œuvre conformément aux règles communautaires en matière d’aides d’État. Dans ce contexte, la Commission a demandé au Portugal des informations sur la mise en œuvre du régime de la zone franche de Madère en 2012 et 2013. Les résultats de l’exercice de suivi ont conduit la Commission à ouvrir une procédure formelle d’examen sur le régime d’aide de la zone franche de Madère en 2018.
La version non confidentielle de la décision sera publiée sous le numéro SA.21259 dans le registre des aides d’État figurant sur le site internet de la Commission consacré à la concurrence, une fois que tous les problèmes de confidentialité auront été résolus. Le bulletin d’information électronique State Aid Weekly e-News donne la liste des dernières décisions relatives aux aides d’État publiées au Journal officiel et sur Internet.