Arrêt de la Cour de justice dans l’affaire C-754/18 Ryanair Designated Activity Company

Un membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui n’a pas la nationalité d’un État membre mais qui est titulaire d’une carte de séjour permanent est dispensé de l’obligation d’obtenir un visa pour entrer sur le territoire des États membres

Le 9 octobre 2017, la police de l’aéroport Liszt Ferenc de Budapest (Hongrie) a procédé au contrôle des passagers d’un vol en provenance de Londres (Royaume-Uni) opéré par Ryanair. À cette occasion, il a été constaté qu’un passager de nationalité ukrainienne, muni d’un passeport non biométrique et d’une carte de séjour permanent valide, délivrée par le Royaume-Uni conformément à la directive relative aux droits à la libre circulation et au libre séjour des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles, ne disposait pas d’un visa. Considérant que, à défaut de disposer d’un visa, ce passager ne détenait pas l’ensemble des documents de voyage requis pour pouvoir entrer sur le territoire hongrois, la police ne l’a pas autorisé à le faire et a demandé à Ryanair de le ramener à Londres.

En outre, elle a estimé que Ryanair n’avait pas pris les mesures lui incombant, en tant que transporteur, pour s’assurer que le passager en question était en possession des documents de voyage requis et a, pour ce motif, infligé une amende d’un montant de 3000 euros à cette société.

Ryanair conteste, devant le Fővárosi Közigazgatásiés Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Budapest, Hongrie), la légalité de la décision administrative par laquelle l’amende en cause lui a été infligée. Elle fait valoir, notamment, que le passager en cause était autorisé à entrer sur le territoire hongrois sans être muni d’un visa puisqu’il disposait d’une carte de séjour permanent valide délivrée par le Royaume-Uni en application de la directive 2004/38.

Dans ce contexte, le Fővárosi Közigazgatásiés Munkaügyi Bíróság demande à la Cour de justice, notamment, si les titulaires d‘une carte de séjour permanent sont dispensés, en vertu de la directive 2004/38, de l’obligation d’obtenir un visa et si le bénéfice de cette dispense de visa s’étend aux ressortissants d’États tiers lorsqu’une telle carte de séjour leur a été délivrée par un État membre qui, à l’instar du Royaume-Uni, ne faisait pas partie de l’espace Schengen à la date des faits à l’origine de l’affaire. De plus, la juridiction hongroise souhaite savoirsi cette carte de séjour suffità attester de la qualité de membre de la famille de son titulaire ou s’il est nécessaire de présenter d’autres documents permettant d’établir une telle qualité.

Par son arrêt de ce jour, la Cour constate, tout d’abord, que, bien que la disposition de la directive 2004/38 relative à la dispense de l’obligation de visa n’octroie expressément cette dispense qu’aux titulaires d’une carte de séjour de membres de la famille d’un citoyen de l’Union, cette circonstance n’est pas, ensoi, de nature à établir la volonté du législateur de l’Union d’exclure du bénéfice d’une telle dispense les membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui sont en possession d’une carte de séjour permanent.

Or, il ressort d’une analyse globale de la directive 2004/38 que les membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui ont déjà obtenu une carte de séjour devraient bénéficier de la dispense en question, le législateur de l’Union ayant entendu accorder le bénéfice de celle-cià tous les membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui détiennent une carte de séjour, quel que soit son type.

À cet égard, la Cour souligne que la carte de séjour permanent ne peut être délivrée qu’à des personnes ayant déjà obtenu une carte de séjour de membres de la famille d’un citoyen de l’Union et ayant légalement séjourné, pendant une période ininterrompue de cinq ans, avec le citoyen de l’Union concerné dans l’État membre d’accueil, en bénéficiant pendant cette période de la dispense de visa attachée à la détention d’une telle carte.

Par ailleurs, la Cour rappelle que la directive 2004/38 vise à assurer une intégration graduelle des citoyens de l’Union et des membres de leur famille qui n’ont pas la nationalité d’un État membre dans la société de l’État membre d’accueil. Or, la réalisation de cet objectif serait compromise sil’acquisition d’un droit de séjour permanent, par les membres de la famille d’un citoyen de l’Union, entraînait la perte de la dispense de visa dont ils bénéficiaient avant d’acquérir ce droit de séjour permanent.

Par conséquent, la Cour retient que le membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui n’a pas la nationalité d’un État membre, mais qui est titulaire d’une carte de séjour permanent, est dispensé de l’obligation d’obtenir un visa pour entrer sur le territoire des États membres.

La Cour relève ensuite que les dispositions applicables à l’espace Schengen énoncent expressément qu’elles n’affectent pas la liberté de circulation des citoyens de l’Union et des membres de leur famille. À cet égard, la Cour constate que la directive 2004/38 s’applique indistinctement à l’ensemble des États membres, que ceux-ci fassent partie ou non de l’espace Schengen, et quesa disposition relative à la dispense de l’obligation de visa ne fait aucune référence spécifique à cet espace.

Il s’ensuit que le bénéfice de la dispense de visa prévue par la directive 2004/38 s’étend aux membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui sont en possession d’une carte de séjour ou d’une carte de séjour permanent aussi bien lorsqu’une telle carte leur a été délivrée par un État membre ne faisant pas partie de l’espace Schengen que lorsqu’elle a été délivrée par un État membre faisant partie de cet espace.

Enfin, la Cour constate que les États membres ne peuvent délivrer, au titre de la directive 2004/38, une carte de séjour permanent qu’aux personnes qui ont la qualité de membre de la famille d’un citoyen de l’Union. Ainsi, la délivrance d’une telle carte par un État membre implique que celui-ci a nécessairement vérifié, au préalable, que la personne concernée a cette qualité. Par conséquent, une carte de séjour permanent est de nature à justifier, en elle-même, que son titulaire dispose de la qualité de membre de la famille d’un citoyen de l’Union. À ce titre, le titulaire d’une telle carte ale droit d’entrer sur le territoire d’un État membre,sans qu’une vérification ou une justification supplémentaire de sa qualité de membre de la famille d’un citoyen de l’Union soit nécessaire.

RAPPEL: Le renvoi préjudiciel permet aux juridictions des États membres, dans le cadre d’un litige dont elles sont saisies, d’interroger la Cour sur l’interprétation du droit de l’Union ou sur la validité d’un acte de l’Union. La Cour ne tranche pas le litige national. Il appartient à la juridiction nationale de résoudre l’affaire conformément à la décision de la Cour. Cette décision lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire.

15/03/2021

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